TABLE DES MATIERES : NEWSLETTER 1 DU 23 AVRIL 1996 |
Le Casse-tête de la Convention de conversion
Licenciement économique : respectez lordre ! (respect de lordre des licenciements)
Du bon Usage...(force dun usage)
Surtout écrivez ! (obligation de motivation)
Le jour où décision fut prise dépouser la profession davocat, il me semblait que lun de ses avantages était de rester étudiant à vie. Pour dire vrai, je nai pas été déçu !
Le droit est une des ces disciplines où la formation permanente est absolument indispensable sous peine de causer de graves accidents et de graves dommages !
En effet, si les textes de loi naissent à une vitesse croissante, leur complexité nest pas en reste...et leur application par les tribunaux et Cours peut parfois surprendre un néophyte.
A lheure où les prises de décision doivent être de plus en plus rapides, mais aussi de plus en plus précises, il ma semblé quune lettre dinformation succincte dans des domaines variés (qui sont aussi les vôtres) pourra susciter intérêt, réflexion...et pourra même, peut être, vous permettre dengager une affaire apparemment simple dans de meilleures conditions car elle pourra toujours faire lobjet ultérieurement de contestations inattendues.
Cest, vous laurez compris, tout lenjeu dune telle publication.
Sagissant du premier numéro elle reste encore bien imparfaite et je souhaite que les prochains numéros soient lobjet de nombre daméliorations.
A cet égard, toutes remarques de votre part seront les bienvenues.
En tout état de cause, je souhaite que ces quelques pages soient encore un moyen daméliorer la communication, à mon sens indispensable, entre le conseil et ses clients.
Dominique LICHTLEN
Pour ce premier numéro, je me devais dillustrer mes propos par une matière particulièrement sujette aux changements de tous ordre : il sagit du droit social et plus particulièrement de la relation salariale...
Le prochain numéro abordera le droit des sociétés. Quoi de plus normal en pleine période dapprobation de comptes !
Bien entendu, si un sujet devait retenir votre attention, nhésitez pas à me contacter !
Le Casse-tête de la Convention de conversion (nexiste plus aujourd'hui......)
Toujours dans lhypothèse dun licenciement économique, il était constant que lemployeur a lobligation de proposer une convention de conversion aux salariés licenciés dès lors quils justifient dune ancienneté dau moins deux ans (sauf cas particuliers telle convention collective plus favorable).
Depuis une décision de la Cour de Cassation en date du 06 décembre 1995, rien nest moins sur !
En effet, il résulte de cette décision pour la moins surprenante que tout salarié, quel que soit son ancienneté, doit se voir proposer une convention de conversion, la loi ne prévoyant aucune condition dancienneté.
La Cour indique que la condition dancienneté résultait de laccord inter-professionnel sur lemploi du 20 octobre 1986 qui na pas été repris par la Loi du 30 décembre 1986 (Loi supprimant lautorisation administrative de licenciement) doù aucune condition dancienneté ne peut être retenue.
Reste un problème Kafkaien, car il nest pas certain que lUNEDIC ladmettra et participe au financement de la convention.
En tout état de cause, lemployeur devrait tout de même proposer
une telle
convention.
Pourquoi faire simple...
Licenciement économique : respectez lordre !
Il nest pas nouveau que toute procédure de licenciement économique doit respecter lordre des licenciements (et ce même sil sagit dun licenciement individuel !) après avoir épuisé toutes possibilités de reclassement interne, voire envisagé toute permutation de salarié.
Le plus souvent, cest la convention collective, ou à défaut lemployeur dans les limites imposées par la Loi, qui définit les critères quil doit prendre en compte pour licencier tel salarié(e) plutôt quun(e) autre en fonction généralement de lancienneté, sa situation familiale, son âge, etc...
A cet égard, il faut même que lemployeur, qui par définition supprime un poste et ne désigne pas une victime bien entendue, vérifie quil ny a pas une permutation possible entre deux salariés pour précisément tenir compte des critères à respecter !
Jusquà une période récente, linobservation -souvent involontaire dailleurs - était sanctionnée par des dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement.
Depuis une décision de la Cour de Cassation en date du 23 janvier 1996, il semble acquis que la méconnaissance des critères fixant lordre des licenciements retire à ceux-ci toute cause réelle et sérieuse.
La sanction est donc particulièrement sévère.
Ainsi, pour un salarié dont lancienneté est supérieure à deux ans, il se verra automatiquement alloué au moins 6 mois de salaire alors que lemployeur devra éventuellement rembourser ses allocations chômages aux ASSEDIC.
Dans le cas despèce, lemployeur avait omis de répondre au salarié qui le demandait (la mesure de licenciement prise) quels ont été les critères retenus pour le désigner...et la cour de déduire que le défaut de réponse de lemployeur laisse le salarié dans lignorance du motif réel de son licenciement qui est, dès lors, dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Il résulterait de cette décision une portée beaucoup plus générale.
A suivre en tout état de cause...sachant quil convient en toute hypothèse dindiquer clairement aux salariés qui le demandent quels ont été les critères prises en compte pour déterminer lordre des licenciements.
En cas de non-réponse, lemployeur sera inévitablement condamné (en tous cas si les Conseils et Cour suivent le raisonnement de la Cour de Cassation ).
Quel est le rang hiérarchique dun usage dans léchelle des normes ?
La réponse à cette question est particulièrement importante en droit social, surtout quand lemployeur entend y mettre fin ou encore harmoniser la situation de nouveaux venus au sein dun groupe.
Il est clair quun usage peut être dénoncé à condition de respecter un préavis raisonnable.
Mais le salarié peut-il invoquer alors une modification substantielle à son contrat de travail et par là même mettre la rupture aux torts de lemployeur ?
La réponse est non car deux décisions récentes rendues par la Cour de Cassation (Ythier Cass. Soc. 31-01-1996, Euro Production 13-02-1996) précisent clairement quil ny a pas incorporation de lusage au contrat de travail (sauf volonté claire expresse exprimée dans le contrat de travail postérieure à la création de lusage).
Cependant, il ne faut pas oublier dinformer les salariés individuellement de la mise en cause de ce droit (lusage) sauf sil sagit dune remise en cause par un accord collectif.
Larticle L. 122-14-2 prévoit lobligation de motiver la lettre de licenciement et lon connaît la sanction.
En effet, dès lors quune lettre ne permet pas au salarié de connaître les motifs pour lesquelles la mesure a été prise, le licenciement est de ce seul fait dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le seul fait dêtre imprécise rend ladite lettre passible de la même sanction.
Notons à cet égard que lemployeur ne peut pas non plus invoquer à la barre des arguments qui ne résultent pas de faits invoqués dans ladite lettre.
Peut importe alors la gravité de la faute réellement commise par lintéressé, le salarié se verra alloué des dommages et intérêts.
Lobligation de motivation existe aussi en matière de licenciement économique.
Il a été récemment jugé (CA Lyon 20 octobre 1995) que la lettre de licenciement ainsi rédigé :
" Nous vous informons que nous sommes contraints de vous licencier pour le motif économique suivant : suppression du poste de secrétaire " apparaît insuffisante au regard de larticle L.122-14-2 du Code du Travail, lemployeur nayant fait aucune allusion aux difficultés économiques et à une restructuration caractérisée par la modification des emplois.
La Cour en conclut que le licenciement est infondée...et peut importe la démonstration de la réalité des problèmes rencontrés par lentreprise. Alors surtout écrivez !